Il y a quelques années, une personne très sage m’a dit ceci: toutes les relations, du moins pour les débuts, doivent être simples, faciles et agréables. J’ai presque crié au génie! J’ai trouvé ça brillant. Assez pour mettre ce précieux conseil dans mon petit baluchon et partir avec afin de le servir à d’autres célibataires qui commençaient une relation qui me semblait quelque peu douteuse.
Dernièrement, j’ai eu un souper avec trois merveilleux couples d’amis. Trois couples qui sont ensemble depuis 25, 17 et 16 ans et dont j’admire la complicité, l’attachement et la solidité de leur amour. Ils sont pour moi les trois exemples du couple parfait après celui de mes parents. Après plusieurs conversations animées sur la politique américaine et plusieurs verres de vin, le propos a dévié sur un sujet dont je ne les avais jamais vraiment entendu parler : leur début amoureux respectif.
En rigolant, l’une a dit: Moi, quand j’ai rencontré mon chum, c’était le plus grand fêtard de l’université. Il ne voulait rien savoir de moi, sauf quand il était un peu saoul. L’autre a rétorqué: Moi, il ne voulait pas de blonde, il n’arrêtait pas de me le dire qu’il était un loup solitaire. Et ma troisième amie a dit en riant: Moi, il venait de se séparer, il habitait encore en appart avec son ex. Il était dans un entre-deux et pas mal mêlé.
Les gars ont tous acquiescé en riant très fort. L’un a dit: J’aimais beaucoup trop avoir du fun et faire le party pour avoir une blonde. Surtout, qu’elle (en parlant de sa femme) était malade après 3 bières. L’autre ajouta: moi, j’étais bien seul. J’étais au début de ma carrière et j’avais de l’ambition. Je n’avais pas de temps et surtout pas d’énergie à mettre là-dessus. Et le dernier a dit: Je la trouvais tellement belle, mais mon ex n’allait vraiment pas bien. Je ne pouvais pas la laisser de même.
En bonne Jeannette Bertand que je suis, j’ai voulu savoir ce qui les avait fait changer d’avis. Mes trois amies ont été unanimes: elles avaient décidé que ça allait marcher. Point. Elles avaient la conviction inexplicable que c’était l’homme de leur vie. Du côté des gars, le discours était différent, mais pas si loin du leur: Quand j’étais avec elle, j’étais bien et je ne voulais pas être ailleurs.
Deux volontés, des contextes qui n’étaient pas si simples finalement.
Je leur ai demandé si selon eux, toutes les relations devaient être simples, faciles et agréables? Les six ont répondu oui, mais qu’il n’y a bien souvent rien de simple et rien de facile avant d’en arriver à ce niveau. Il faut s’ajuster, beaucoup de volonté pour changer certaines habitudes et surtout, avoir envie d’être avec l’autre et ça, ça prend du temps. C’est en apprenant à connaître une personne que l’idée d’être en couple avec elle se forge. Ce n’est pas au tout début.
Je suis repartie chez moi avec un drôle de goût dans la bouche. Se pourrait-il que depuis des années, je m’accroche à une idée du couple qui est tout aussi chimérique que le prince charmant sur son cheval blanc? Que cette façon de penser ne fait que me protéger davantage de l’engagement? Car quand j’y repense, plusieurs de mes anciennes relations se sont terminées parce que je ne les trouvais pas assez simples, faciles et agréables à mon goût. Aussitôt que c’est un peu compliqué, je prends la poudre d’escampette, sans préavis et sans donner de véritable raison. Je ne persiste pas, même si l’autre m’attire au plus haut point.
Je me suis donc accrochée à une parabole toute faite en pensant que c’était le secret pour savourer un éventuel bonheur à deux. Je me suis rendu compte que j’avais tout faux en prenant ce conseil à la lettre. Ça ne peut pas toujours être simple au début. L’union de deux personnes reste tout de même la rencontre de deux univers. Des univers qui n’ont quelquefois rien à voir l’un avec l’autre. Que tu aies des enfants, que tu sois seul depuis des années, que tu vives une séparation, que tu aies eu de mauvaises expériences amoureuses ou que tu sois un monstre d’indépendance, il y a toujours ce petit quelque chose qui ne rendra pas les débuts nécessairement faciles. Parce que nous arrivons avec notre bagage de vie et que ça prend de l’ajustement et surtout de la volonté pour être en couple. Beaucoup de volonté. Le succès de toute chose ne vient jamais avant un travail acharné.
La prochaine fois que je donnerai ce conseil, j’y ajouterai un grain de sel. Dans ma prémisse, il y a un mot que nous avons passé un peu sous silence, mais qui représente selon moi est essentiel. C’est le mot «agréable». Si, à la base, passer du temps avec l’autre est agréable, les choses se feront par elles-mêmes si elles doivent arriver. La simplicité et la facilité arriveront chacune en leur temps. Il faut savoir être patient. Ne dit-on pas que tout vient à point à qui sait attendre?